Les Disparus de Radio Neptune


On raconte toutes sortes d'histoires dans la jungle brestoise…

 

Si le hasard de votre emploi du temps, ou l'ennui (allez savoir ?), vous conduisent à aller entendre le récit historique de Radio Neptune par son conférencier émérite Jean-Louis Le Corvoisier, fils de Louis le créateur, n’hésitez pas à lui demander de vous éclairer sur un des plus grands mystères radiophoniques de ces récentes années…

 

Oublions le triangle des Bermudes, les statues de l’île de Pâques ou l'homme de Roswell (quoique…) et plongeons-nous vers le 7, rue du Château, bâtisse brestoise envahie de nombreuses entités radiophoniques. Outre le souvenir du grand Pierre Gilles, les rumeurs courent sur le fait insensé que plus d'une dizaine d’artistes chroniqueurs, hommes, femmes, accompagnés de plus de 300 invités, y seraient entrés, y auraient travaillés… Puis auraient disparus à jamais sans laisser le moindre souvenir !

 

Je comprends votre étonnement face à cette soudaine révélation terrifiante ! S’agirait-il de propos égarés de quelques consommateurs de crêpes au sucre (mais est-ce vraiment du sucre ?), d’illuminés adorateurs de menhirs ou de testeurs de murs sans casque ? Ils en est même pour vous donner des précisions ahurissantes sur la fréquence de deux émissions hebdomadaires d’une heure chacune étalées entre 2009 et 2013…

 

Des émissions en direct du cabaret Le Vauban pour son 50e anniversaire y auraient été enregistrées mais jamais pour autant diffusées… Le machiavélisme des mythomanes ne connaîtrait donc aucune limite ? Certains esprits faibles vous affirmeront y avoir entendus de leurs oreilles des musiciens, peintres, auteurs, comédiens, metteurs en scènes, historiens de l’art, poètes, chanteurs, psychothérapeutes, sophrologues, diseuses de bonnes ou mauvaises aventures, reine de beauté, roi du calembours, pousseuse de gueulantes des Chroniques brestoises, mais pas de raton laveur !

 

Bref, des mots et des anachroniques…

Que peut-il bien se passer au-dessous du vol menaçant des goélands dans la tour de cette forteresse que l’on ne franchit que par une porte dérobée débouchant sur une cour sordide où les mousses et les lichens ont depuis longtemps dévorés le pavé… en face du garage maudit où tout, paraît-il, débuta. Après quelques résistances, une porte vous fait pénétrer dans le saint des saints où se seraient produit ces terribles événements ! Cependant, derrière un rideau du 3e étage, une ombre quelquefois vous observe : c’est la voix du maître des lieux vous annonçant dans le poste le Requiem de Verdi. Tandis qu'au-dessus de vos têtes, un goéland dans son ivresse aérienne vous répète à plaisir : « Nevermore, nevermore » !

 

Les créateurs de Radio Neptune gardent dignement le silence (un comble pour une radio !) sur cette étrange affaire. Face à l’hallucination collective, l’amnésie de famille se révèlerait être la meilleure parade… Seul contre tous, le capitaine mène sa radio au-dessus de tous les pouvoirs corrompus, au-dessus de la vénalité commerciale ou du souvenir de ces médiocres qu’il eut la faiblesse d’employer gratuitement lorsqu’il en eut la nécessité absolue... À naviguer en eaux troubles, on n’est jamais loin du naufrage. Les plus belles légendes que l’on se fabrique reposent souvent sur les fondations fragiles de notre ingratitude. On a la générosité que l’on se donne !

 

De la capitale d’où je viens (et pourtant si fort décriée ici), malgré l’âpreté des conditions artistiques et les accidents d’amitiés, il existe plusieurs manières de rétribuer un artiste : le cachet, le salaire, le défraiement ou la participation. Lorsqu’il n’y a rien de tout cela, il n'existe qu'un seul salaire exigible : le respect, la mémoire et… la reconnaissance élémentaire !

 

Que Neptune repose en paix…

Et que Mozart et Stan Getz protègent sa pauvre mémoire défaillante.

 

Thierry Scattolin, mai 2016

Auteur, comme ses camarades,

de 259 chroniques diffusées sur Radio Neptune



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